18 mars 2006

LE MAGNETOPHONE DE JANY

Nous tournions notre ennui entre le 4 et le 22 de la rue Gustave Eiffel, au cours d'un de ces célébres étés pourris de 1966 et 1967.
Nous avions tout d'abord, découvert cette formidable invention du langage français, "été pourri", ce qui pour nous qui n'avions connu que de véritables étés semblait une sorte de farce énorme, comme le riz blanc pour le mangeur de paella ou le vin à l'apéritif pour un buveur d'anisette.
Ce qui caractérisait ces étés pourris, est que le Ministère de l'ORTF, il n'y avait qu'une seule chaine de TV à l'époque, attendait les prévisions de Météo France pour l'après midi et décidait alors, en cas de pluie, et pour éviter que les jeunes désoeuvrés des cités, ne passe leur temps dans les cages d'escalier à commettre on ne sait quels délits, de diffuser à 15h00, un film inédit pour édifier notre sens moral et notre culture.
Ces films restent des références , du style "le jour où la terre s'arrêta", "la guerre des deux mondes", "la créature de l'espace" et autres chefs d'oeuvre de la culture américaine, ce qui semble aujourd'hui un véritable paradoxe pour un gouvernement dont le Président n'était autre que le Général de Gaulle, et le Premier Minstre un certain Michel Debré.
Forts de cet exemple, au cours de ces étés pourris, nous avions inventé une activité créatrice grace au magnétophone à bande que notre cousine Jany avait reçu à l'occasion de sa réussite au BEPC.
C'était une grande première à l'époque, de disposer de cet appareil magique qui permettait d'enregistrer sa voix.
Passés les premiers jeux à enregistrer en cachette la voix des autres et à leur repasser jusqu'à l'ennui, nous en étions arrivé, après plusieurs après midi de tatonnements, à de véritables séances d'enregistrement.
Munis des derniers numéros de salut les copains, qui publiait chaque semaine les paroles des tubes en vogue, les chou-chous de la semaine, nous nous affutions à produire le meilleur de nos talents de chanteur sur les bandes qui tournaient à l'envie.
Je me souvient de Jany qui s'époumonait sur les traces de Johnny "dans la vallée de l'Oklahoma, un coup de fusil fait mouche à toutes les fois, mais attention un jour tu finiras dans la poussière les bras en croix...tu triches au jeu et dans le pays...."
Damien mon fère, dans un registre tout à fait particulier, avait choisi Bobby Lapointe et sa Julie Bonbon c'est bon c'est bon.....elle servait le champagne chez M Taittinger...
Je passerais sur la performance de Monique, alors fan inconditionnelle de Marie Laforet, qui nous faisait frisonner avec les vendanges de l'amour.
Affranchis du micro, et sous la houlette du Prince, de passage pour des vacances, nous nous étions lancés dans des réalisations plus ambitieuses, notamment une pièce qui se déroulait à Paris, dans un club mal famé où l'on buvait du Costières du Gard avec Gigi et Lulu de Paname et Albert Tutucelli dit la Fontaine à Prunaux.
heureux étés pourris de la France des années 1960 juste un peu avant mai 1968.

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